Le 14 mai 2010

« Chacun fait preuve de plus ou moins de morale fiscale »

Une mauvaise perception de l’administration fiscale, un sentiment d’iniquité… les aspects psychologiques ont une grande importance en matière de fraude fiscale. Les explications de Cécile Bazart, une universitaire spécialiste de la question.

« De l’erreur à la fraude pure et simple, en passant par l’évasion, tous ces phénomènes relèvent de l’indiscipline fiscale. Si l’intention définit la fraude, la frontière est parfois floue entre ces différents phénomènes. Nous qualifierons donc de fraude cet ensemble pourtant très disparate incluant l’erreur à côté de la fraude au sens strict.
Cela posé, qui sont les fraudeurs ? Les données sont peu nombreuses mais on peut relever des catégories socioprofessionnelles à risque. Généralement celles pour lesquelles il est plus facile de frauder : les professions libérales, les agriculteurs, les commerçants. De même, toutes les simplifications de régimes ou de règles comptables peuvent rendre moins visible la fraude des entreprises. On peut donc penser que certains sont plus exposés que d’autres.

Un impôt jugé inéquitable favorise la fraude
Pour autant, si l’on considère à la lumière de la théorie économique la fréquence des contrôles et les taux de pénalité applicables, tout le monde devrait frauder, ce qui est loin d’être le cas. Les facteurs psychologiques sont donc très importants. L’impôt, les processus de décision et les rapports contribuables-administration fiscale déterminent en effet le degré de moralité de chacun.
Mauvaise perception de l’administration fiscale, sentiment d’iniquité de l’impôt et idée que la fraude est un sport national favorisent l’indiscipline fiscale. Car ces opinions donnent le sentiment à ceux qui acquittent leur impôt qu’ils sont les seuls à le faire. De plus en plus, les administrations fiscales tiennent compte de ces aspects psychologiques.

D’autres enjeux apparaissent aujourd’hui :
- la fraude traverse les frontières, une dimension prise en compte par l’OCDE,
- les nouvelles technologies de l’information et de la communication créent des méthodes inédites de fraude, notamment au travers de l’e-commerce,
- la lutte contre la fraude fiscale se rapproche de plus en plus de celle contre la fraude sociale, car le travail dissimulé génère un manque à gagner important pour l’Etat et les administrations sociales. »

Cécile Bazart est maître de conférences à l’université Montpellier I.

Pour aller plus loin :
- Bien déclarer son ISF pour éviter les contrôles fiscaux
- ISF : de l’importance de déclarer son patrimoine détenu à l’étranger