Entreprises de la tech : quand et comment envisager l’IPO ?

Décryptage avec Guillaume Morelli, Head of Listing France, Portugal, Spain – Euronext

Pourquoi entrer en Bourse ?

L’introduction en Bourse n’est pas un but mais un outil destiné à répondre à des besoins stratégiques.

Ces besoins sont de quatre ordres :

  • Indépendance & liberté entrepreneuriale : la Bourse est le seul outil de financement qui n’a pas d’horizon de temps. Entrer en Bourse permet de se financer auprès d’investisseurs boursiers qui n’interviennent pas dans la stratégie, le conseil d’administration ou encore dans le choix des moyens mis en œuvre pour atteindre les objectifs. De la même façon qu’ils ont la liberté d’acheter ou de vendre, ils accordent la liberté d’agir aux entrepreneurs. Passer du non coté au coté, c’est libérer sa gouvernance.
  • Financement : il s’agit de se rendre éligible à de nouveaux bassins de financement en s’ouvrant un accès à des investisseurs internationaux actifs sur les marchés des actions. De plus, avec la liquidité quasi constante offerte par la Bourse, il n’est pas nécessaire d’attendre que ses échéances soient à maturité pour pouvoir monétiser.
  • Crédibilité : la cotation, c’est un label d’exigence et de légitimité. On se donne une ampleur et une crédibilité à l’international, auprès des grands donneurs d’ordre et des fournisseurs, auprès de futurs salariés et auprès des partenaires financiers.
  • Visibilité : l’IPO(1) est un marqueur d’ambition, elle permet de dire haut et fort qui on est et où on veut aller.

En synthèse, l’introduction en Bourse est un outil de diversification du financement et de visibilité dans un moment d’accélération.

Qui peut prétendre à entrer en Bourse ?

Il n’y a pas de profil type pour entrer sur les marchés, car les critères de chiffres d’affaires, de rentabilité ou de perspectives de croissance scrutés par les investisseurs vont varier d’un secteur à un autre.

Par exemple, les sociétés des sciences de la vie rentrent sur les marchés pour financer la R&D auprès d’investisseurs spécialisés ou prêts à attendre parfois plusieurs années avant la génération de chiffre d’affaires. Si on regarde les projets qui sont entrés en Bourse dernièrement, ce sont majoritairement des entreprises de croissance, en phase de développement important et avec une ambition internationale, qui avaient déjà fait des levées auprès d’acteurs du private equity(2) (séries A, B, C). Certains secteurs, comme les cleantech, profitent particulièrement de l’appétit des marchés. Citons aussi les entreprises familiales, qui sont des candidats appréciés par les investisseurs.

En fonction de son profil et de ses besoins, une entreprise peut s’introduire sur le marché réglementé (Euronext) ou un marché adapté aux PME (Euronext Growth ou Access), dont les exigences et les critères d’entrée sont moins stricts.

Quels sont les défis à relever pour réussir son entrée en Bourse ?

Le tout premier défi, c’est celui de la maturité et de la qualité de l’equity story(3). Une entreprise qui entre en Bourse doit avoir fait la démonstration de sa capacité à grandir indépendamment de ses actionnaires historiques. Le projet, la vision, les perspectives de croissance et les moyens de les atteindre doivent être clairement exprimés dans l’equity story(3) qui sera présentée au marché.

Une entreprise candidate à une introduction en Bourse doit également choisir soigneusement ses partenaires internes et externes. Le choix de conseils ayant l’expérience adaptée et une connaissance du secteur concerné s’avère essentiel. Les dirigeants doivent également pouvoir s’appuyer sur une direction financière robuste et des équipes internes capables de « tenir la barre » pendant la préparation de l’IPO(1).

Autre défi : choisir le bon moment. C’est pourquoi l’entreprise doit amorcer la réflexion pré-IPO et les chantiers préalables suffisamment en amont pour pouvoir lancer le process au moment le plus opportun. Il faut être prêt en matière de documentation financière (structure organisationnelle, comptes aux normes IFRS, l’International Financial Reporting Standards, etc.) ainsi que pour les obligations liées aux publications des chiffres, pouvoir répondre à la nécessité de faire des roadshows et de la communication financière.

Qui sont les acteurs clés d’une IPO ?

En interne, pour commencer, c’est le dirigeant, le directeur administratif et financier et les membres du board(4). Pour chacun, il s’agit d’apprendre à se positionner, à réfléchir, à s’entourer et à agir comme des décideurs d’une entreprise cotée. Pour des personnes qui viennent de l’univers du non coté, ce n’est pas naturel, cela demande un vrai travail pour changer de posture et pour se constituer un autre réseau.

Ensuite, parmi les partenaires externes, il y a bien entendu la banque d’investissement, qui occupe différents rôles au cours des différentes étapes du processus. C’est elle qui va notamment convaincre les investisseurs, sur la place parisienne mais aussi dans les capitales européennes, en Amérique du Nord et en Asie, d’investir dans le projet.

Dans certaines opérations, le rôle de chef d’orchestre de l’IPO(1) est pris en charge par un « equity advisory(5)», ou pour les plus petites sociétés un « listing sponsor(6) », qui va coordonner les différentes étapes et l’ensemble des parties prenantes de l’IPO(1).

Le cabinet d’avocats spécialisé en droit boursier est également un acteur incontournable, tout comme le cabinet d’audit et de conseil.

Il y a aussi l’agence de communication financière, qui maîtrise les codes et qui coordonnera la visibilité externe du projet d’IPO(1) et les relations avec les médias.

Les autres partenaires sont l’AMF (Autorité des marchés financiers) et l’opérateur de marché (par exemple nous, Euronext).

Au total, une introduction en Bourse est menée par un « commando » de 30 à 50 personnes qui vont travailler en moyenne pendant six mois pour l’entreprise qui passe du monde non coté au monde coté.

Comment Euronext accompagne-t-elle notamment les entreprises de la tech dans ce process ?

Les équipes d’Euronext accompagnent au quotidien les équipes dirigeantes et leurs actionnaires dans leurs réflexions pré-IPO.

Nous avons également développé des initiatives structurées, notamment :

  • Le programme TechShare, un programme gratuit de formation de six mois, conçu pour accompagner les dirigeants de sociétés tech dans la préparation d’une potentielle introduction en Bourse. Cet accompagnement se réalise à trois niveaux : la montée en compétences techniques sur un processus d’IPO(1), la mise en relation avec les experts des marchés de capitaux et le partage d’expérience avec d’autres dirigeants déjà cotés.
  • L’initiative Euronext TechLeader (dont Natixis est aujourd’hui un partenaire de premier rang) est destinée aux leaders de la tech européenne déjà cotés et valorisés au moins à 300 millions d’euros. Principalement des licornes et futures licornes. Ce programme vise trois objectifs :
    • renforcer la capacité collective à promouvoir les succès de la tech européenne :
    • améliorer l’accès de la tech européenne au financement ;
    • créer des dynamiques à l’échelle de l’écosystème européen, dans lequel Paris joue un vrai rôle de capitale.

Enfin, nous avons développé des cursus consacrés aux fonds et actionnaires historiques (PE Share) pour leur permettre de mieux appréhender les enjeux d’une sortie en Bourse d’une de leurs participations.

Le Pre-IPO Corner TMT, pour bien préparer votre introduction en Bourse

Les chargés d’affaires Néo Business en Caisse d’Epargne, en étroite relation avec les équipes Natixis* SECM (Equity Capital Market) accompagnent les start-up dans le cadre de la préparation d’un projet d’introduction en Bourse.
Ils interviennent notamment via un « Pre-IPO Corner TMT », qui permet aux start-up technologiques de se confronter chaque année à des investisseurs institutionnels familiers de la Bourse leur permettant de « s’exercer » au process d’introduction en Bourse en situation réelle (rdvs en format speed-dating).

Natixis a rejoint la communauté des Euronext Tech Leaders.

(1) IPO : Initial Public Offering, terme international pour désigner l’introduction en Bourse
(2) Private equity : capital-risque et capital-investissement
(3) Equity story : histoire présentée aux investisseurs en vue d’une levée de fonds ou d’une entrée en Bourse
(4) Board : principal organe de direction d’une société, incluant ses investisseurs
(5) Equity advisory : société de conseil experte en marchés boursiers
(6) Listing sponsor : intermédiaire financier chargé de l’accompagnement à l’entrée en Bourse